Art & Architecture

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Les statues et statuettes

La signature du sculpteur Alexandre Falguière inscrite dans le bronze du Buste de Diane

En bois ou en pierre, discrètes ou chatoyantes, solennelles ou mélancoliques, Mouliérat les aimait toutes et en a installé dans toutes les pièces de ses appartements !

Ecce Homo

Tilleul, cormier ou poirier étaient très fréquemment utilisés pour les figures de retable. Si nous sommes aujourd’hui séduits par la finesse du grain et la patine dorée du matériau, n’oublions pas que ce type de sculpture était autrefois peint de couleurs vives. L’appréciation du bois pour sa beauté propre n’interviendra, dans le choix d’une essence, qu’à partir du XVIIIe siècle et surtout aux XIXe et XXe siècles. Auparavant, seuls primaient pour le sculpteur les qualités physiques : solidité et facilité à se soumettre à l’outil, absence de défauts comme les nœuds qui fragilisent une grume de bois, résistance au temps.

La scène représentée est un moment d’intense dramaturgie : Pilate désigne Jésus à la foule hostile en lui posant le manteau de pourpre sur les épaules, un geste théâtral figé à l’instant même où Pilate prononce le fameux Ecce homo, voici l’homme... qu’il livre au supplice.

La représentation de cet épisode biblique, précisément codifiée, est ici respectée : couronne d’épines et manteau pour Jésus, turban et costume somptueux pour Pilate.

L’intérêt porté par le sculpteur à la musculature du Christ, la préciosité des détails vestimentaires mais, avant tout, la qualité de la facture sont autant d’éléments qui évoquent un des meilleurs ateliers bruxellois au début du XVIe siècle.

Sculpture en bois de l'Ecce Homo, réalisée à Bruxelles dans le premier quart du seizième siècle, fragment de retable, bois autrefois polychrome, 38 centimètres de hauteur
Ecce Homo, Bruxelles, 1er quart du XVIe siècle, fragment de retable, bois autrefois polychrome, h. 38 cm, Château de Castelnau-Bretenoux

© Pascal Lemaître - Centre des monuments nationaux

Vierge en majesté

La Vierge assise sur son trône, ou Vierge en majesté, présente son fils et son regard porte au loin. Elle le garde certes en son giron, mais l’enfant est déjà sévère, presque adulte par sa physionomie. Pour le sculpteur ou imagier du XIIIe siècle, il était inimaginable de représenter Dieu incarné tel un simple bébé. Le Christ enfant est déjà un homme fait dans l’esprit médiéval. Souriante et sereine, la mère est image de sagesse (Sedes sapientiae, siège de la sagesse).

Et si le sculpteur choisit de représenter Marie avec cette tête volumineuse, disproportionnée, c’est tout simplement pour illustrer très concrètement la supériorité de l’esprit sur le corps : une image simple pour traduire efficacement un concept fondamental et frapper les esprits. Nombreux sont les artistes à l’époque romane, et en particulier en Limousin, à user de ce symbolisme.

Sulpture de Vierge en majesté en bois réalisée dans le Limousin, première moitié du treizième siècle, bois doré polychrome, quatre-ving trois centimètres de hauteur
Vierge en majesté, Limousin, 1ère moitié du XIIIe siècle, bois doré polychrome, h. 83 cm, Château de Castelnau-Bretenoux

© Pascal Lemaître - Centre des monuments nationaux

Buste de Diane

Cette œuvre d’Alexandre Falguière – contemporain de Jean Mouliérat – trônait dans l’un des salons à Castelnau : Diane pourrait faire figure d’intruse parmi les vierges médiévales et autres sculptures Renaissance. Il est vrai que ce buste ne figure pas dans l’inventaire des collections en 1932, date de la donation à l’État. Offert par la ville de Paris à Jean Mouliérat en 1888, puis sans doute conservé dans l’appartement parisien du ténor, il aurait rejoint le château de Castelnau après sa mort.

Ce fier visage ne nous est pas inconnu. Hortense Fiquet – soit madame Cézanne en personne – a campé pour Falguière une déesse de la chasse farouche et hautaine. Le croissant de lune porté sur le front est l’attribut traditionnel de Diane, associée au culte lunaire. Appréciée pour son profil à l’antique et ses formes sculpturales, Hortense pose pour de nombreux artistes et élèves de l’École des Beaux-Arts de Paris. Autre atout non négligeable : Hortense sait garder la pose sans rechigner. Son surnom de Belle Biquette évoque assez bien la chaleureuse ambiance des ateliers de sculpture ! Pour découvrir la Diane de Falguière en pied, rendez-vous à Toulouse, au musée des Augustins (marbre exposé au Salon de 1887) ou au Jardin des Plantes (copie de la sculpture du musée des Augustins)…

Falguière, avec l’école toulousaine de sculpture, va rajeunir le sujet du nu en s’éloignant des canons classiques. Il choisit de représenter Diane sous les traits d’une femme contemporaine, charnelle et solide. Si le marbre prend place parmi les collections nationales, le travail du fondeur assure la diffusion du modèle (ici, le détail de la tête de Diane) en multiples exemplaires sur le marché de l’art. La qualité du bronze, le soin apporté aux finitions et à la patine marquent les plus belles productions. Voilà comment le buste de Diane orne encore de nos jours le grand salon du château de Castelnau.

Buste de Diane en bronze du sculpteur Alexandre Falguière, dernier quart du dix-neuvième siècle, cinquante-huit centimètres de hauteur
Buste de Diane, Alexandre Falguière, dernier quart du XIXe siècle, Bronze, h. 58cm, Château de Castelnau-Bretenoux

© Pascal Lemaître - Centre des monuments nationaux

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